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AG du 17 mai 2019 : le compte-rendu AG du 17 mai 2019 : le compte-rendu

mercredi 19 juin 2019, par Etienne André, Fabien Thorel, Frédéric Brut, Sébastien Jouannic

L’assemblée générale 2019 de l’association Espac’EPLE s’est tenue au lycée Louis-le-Grand de Paris 5e. Nous y avons été accueillis par M. Jean BASTIANELLI, proviseur, à dix heures précises.

Café d’accueil assuré par le lycée Louis-le-Grand
Accueil et orientation par les élèves ARCU du lycée Blum de Créteil
Mot d’accueil du proviseur du lycée Louis-le-Grand

Espac’EPLE dans son environnement

Fabien Thorel, président, expose la place que l’association des comptables d’EPLE s’est patiemment construite dans le monde éducatif et administratif. Nous sommes reconnus par notre ministère, et reçus occasionnellement en audience à la direction des affaires financières, et admis à présenter l’association lors des formations des comptables dispensées à l’IH2EF.

Rapport moral par le président

Du côté des Finances publiques, nous entretenons d’excellentes relations avec la DGFiP, le bureau CE2B au niveau national et certaines DR ou DDFiP qui participent aux travaux de nos délégations académiques. Espac’EPLE est invitée chaque année au séminaire national des comptables d’établissements publics nationaux, ce dont nous rendons compte dans ce site.

Du côté de la représentation et de la solidarité, le partenariat est solide avec AJI-Gestion pour l’éducation. Il est rappelé à tous les collègues qu’il faut s’inscrire pour l’assemblée générale de l’AJI, le vendredi 21 juin prochain à la Sorbonne, où se fêteront les trente ans de l’association. En revanche, les relations demeurent décevantes avec les syndicats de personnels administratifs du MEN, qui ne comprennent pas la pertinence de notre existence complémentaire de leur propre travail de représentation.

Nous échangeons aussi avec les associations de comptables publics, ACP (réseau DGFiP), AACBAEP (grands établissements).

Activité du national

Cette année nous avons porté, en partenariat avec la délégation de l’académie de Dijon, un séminaire national sur la paie en EPLE : voir compte rendu sur le site. L’association est très satisfaite de ce séminaire et les retours sont très positifs.

Le bureau national s’est réuni trois fois cette année, à Paris, le 12 octobre 2018, le 14 décembre 2018 et le 15 mars 2019.

Rapport moral d’Espac’EPLE 2018-19

OpenCarteComptable : l’intérêt est de construire un outil d’aide à la décision sur les prises de poste, les stratégies académiques. Il faut insister sur l’aspect collaboratif. L’association l’a mis au point en partenariat avec la startup d’État OpenAcadémie pour améliorer l’outil. Nous y voyons un outil d’aide à la décision pour la prise de poste, de recherche pour les mutations. Il faut donc que chacun s’en saisisse pour mettre à jour la base pour qu’elle devienne la plus opérationnelle possible.

Le prochain projet d’envergure est un nouveau séminaire, qui portera sur les mobilités internationales, avec l’agence Erasmus, donc à Bordeaux. Pour un travail de qualité, nous devons disposer de temps pour ce faire, et nous annonçons dès maintenant ce projet pour une date probable d’exécution en septembre 2020.

Activité des académies

L’association se félicite de la naissance des délégations de Strasbourg et de Bordeaux, ainsi que du réveil de l’association affiliée Espace 20 à Amiens. Dans d’autres académies, du fait du mouvement des collègues des dynamiques peuvent se perdre, et tous les membres de l’association doivent se sentir en charge de la vie locale, ils y seront aidés par les membres du bureau national qui s’attachent à la bonne santé de tout notre réseau.

L’objectif premier et primordial d’Espac’EPLE est d’organiser sur le terrain des échanges entre collègues, ces réunions justifient l’existence de l’association.

Le site web de l’association

Etienne André, webmestre, rappelle que la visibilité de l’activité d’Espac’EPLE est nulle si elle n’est exprimée en clair sur le présent site web. Il se met à la disposition des collègues pour la mise en forme de leurs contenus. L’erreur la plus funeste consiste à laisser reposer l’invitation aux réunions sur des envois de courriels, qui se perdent dans un flux continu, et ne laissent aucune trace même chez leurs destinataires. Au strict minimum, envoyez toujours une copie de tels messages à Etienne (webmestre esc@rgot espaceple.org), pour qu’il puisse reporter vos annonces.

Ensuite il est nécessaire de rédiger des comptes-rendus de votre activité. Prendre des notes manuscrites puis les recopier plus tard le soir chez soi est éreintant ; il est universellement plus rentable de prendre des notes au clavier, même si l’on n’est pas un as de la typographie. Les notes brutes peuvent être déposées sur le site puis retravaillées jusqu’à mériter la publication.

Programme d’activités 2019-2020

Poursuivre le développement, cf diapo

Point financier

Frédéric Brut présente les dépenses de l’association de l’exercice 2018. Les académies ont émis des appels de remboursements pour 600 €, et le national a dépensé 6 k€. L’AG 2018 a coûté 3700 €, le séminaire 2 k€.

Les encaissements sont de 10 k€, dont 2 k€ de soutien par notre partenaire la Banque Française Mutualiste. Le résultat de l’exercice 2018 est donc un bénéfice de 3 k€, les disponibilités se montant à 23 k€.

Rapport financier Espac’EPLE 2018-19

Nous comptons 330 adhérents le 16 mai, contre 399 l’année dernière (ces chiffres ne décomptent pas les associations académiques fédérées de Martinique, Lille et Amiens). Il est nécessaire de relancer les collègues pour les faire adhérer. Le trésorier lui-même a du mal à suivre un flux continu de courriers individuels : pour lui faciliter la tâche, il est préférable de passer par votre correspondant financier académique qui enverra les adhésions par lots plus simples à traiter.

Approbation du rapport d’activité et du rapport financier, et du programme d’activités

Le rapport d’activité, le rapport financier puis le programme d’activités sont présentés à l’assemblée générale, qui les adopte successivement à l’unanimité.

Hommage à Bernard Blanc

Notre association est née en 2010 suite à des discussions sur le forum que Bernard a fondé, et suite au défi lancé par Bernard lui-même. Fabien propose de le nommer comme membre honoraire aux côtés de feu Eric Legendre (qui a porté le projet d’association à ses grands débuts), Marie-Anne Balin (première présidente) et Diadji Ndao (créateur des logiciels d’analyse financière Cogefi puis Reprofi). Cette distinction est adoptée par acclamation.

Présentation de la souscription "nanardisme"

Etienne André annonce la sortie à compte d’auteur d’un ouvrage en hommage à Bernard Blanc : Pratique du nanardisme dans un EPLE. C’est un pastiche du manuel édité par Berger-Levrault, il sera aussi épais, composé des bonnes feuilles des échanges des gestionnaires sur le forum lors des quinze années écoulées. Dans le couloir de l’amphi, le projet est présenté par des plaquettes publicitaires, il est possible de prendre des bons de souscription (règlement par CB en ligne de préférence). Au même instant que cette annonce, Bernard Blanc recevait un appel téléphonique de l’une des autrices du futur ouvrage, lui annonçant les intentions du petit groupe de conjurés.

Intervention de Mme la professeure Stéphanie Damarey : le contentieux financier. perspectives d’évolution des comptables et des ordonnateurs

La LOLF puis le décret GBCP ont fait évoluer le cadre, et des difficultés sont apparues dans le régime de responsabilité.

Historique de la séparation ordonnateur-comptable : les origines s’en trouvent dans l’ordonnance du 14 septembre 1822. Avant même, en 1793, le bureau de la comptabilité publique conçu par Pierre-Joseph Cambon, tenant le grand livre de la dette publique, prévoyait la possibilité de mettre en cause par le débet la responsabilité des comptables publics (la Cour des comptes sera fondée en 1807). Cette attitude de défiance envers les comptables publics trouve ses racines dans les excès des gabelous sous l’Ancien Régime.

La Cour des comptes est-elle aujourd’hui encore une alliée du gouvernement, ou du chef de l’État ? Parfois la responsabilité du comptable public est mise en cause avec des débets importants, 9M € pour un comptable ministériel (remise gracieuse par le ministre, laissé à charge de 47 k€). La profession s’est démocratisée par le cautionnement mutuel au début du XXe siècle.

Suite au nouveau régime de responsabilité en 2011, on craint une augmentation des coûts assurantiels, ce qui a été le cas.

Aménagements au principe de séparation ordonnateur-comptable : ils sont prévus par les textes : régies, DAO, mandataire du comptable, etc. Un certain nombre de dispositifs rendent le principe vivable, et permettent de nuancer la césure, comme la réquisition.

D’autres aménagements contemporains depuis la LOLF et GBCP : les frontières se sont encore estompées. L’opinion publique réclame des ordonnateurs des progrès dans l’usage des fonds publics ; l’évolution des techniques administratives permet des économies d’échelle avec les services facturiers ou les agences comptables intégrées.

Un peu partout le sujet se discute, le régime actuel de responsabilité n’est pas satisfaisant, il faut discuter de la responsabilité des ordonnateurs autant que de celle des comptables. En octobre 2018, une proposition de loi a envisagé la suppression pure et simple des comptables. Il faut se figurer que le dispositif français n’est pas le plus partagé en Europe et dans le monde. En Allemagne ou au Royaume-Uni, l’instance n’a qu’un rôle d’audit et inspection, et ne juge pas les comptables. Il peut être tentant de supprimer la compétence du juge financier à l’égard des comptables, ce n’est cependant pas du tout le point de vue de la Cour des comptes.

En tant qu’universitaire, Mme Damarey tient une position nuancée, parfois en désaccord avec les magistrats. Plusieurs chercheurs seront auditionnés le mois prochain par la Cour des comptes. Il est nécessaire de se baser sur le droit positif, à savoir le régime de 2011. C’est un régime que Bercy a du lâcher : la première question qui se pose est « est-ce qu’il y a eu un préjudice financier ». La négociation a porté ensuite sur le pouvoir de remise gracieuse.

Philippe Séguin a été actif dans la rédaction du projet de loi. Il y avait un projet de réforme de la Cour de discipline budgétaire et financière. En 2009 le projet de loi arrive sur le bureau de l’Assemblée nationale, et Philippe Séguin décède en 2010. La commission envisage la suppression pure et simple de la remise gracieuse : il y avait des rumeurs sur l’utilisation systématique de la remise gracieuse, mais aucun chiffre public, seulement des estimations par les magistrats qui estimaient que dans 95 % des cas la décision de justice était contrecarrée par la décision ministérielle. Cette anomalie principielle serait censurée par la CEDH, mais faute d’un intérêt à agir, cela n’a jamais eu lieu.

En 2000 obligation d’application de l’article 6-1 de la CEDH sur la publicité des débats ; parfois les délais de jugement des comptes atteignaient quinze ans. Les textes ont tenu compte en 2006 des observations de la Cour européenne, avec l’apparition de la notion de force majeure. La remise gracieuse ne tient pas la route, mais en l’absence de recours elle survit. En pratique le respect de la décision du juge n’est pas assuré. Les magistrats financiers ont tenu compte des remises gracieuses, et cela a influencé leur activité, ils ne vérifiaient plus certains faits de la même manière.

En 2011 les députés ont entendu les magistrats, une commission d’enquête parlementaire (rapport 2009) a établi les chiffres réels sur les remises gracieuses, et c’était bien 95 %. Comme le rapport 2015 de la Cour de comptes le mentionne, les recherches ultérieures ont déterminé que le véritable chiffre était entre 99,7 et 99,9 %.

Face à cette proposition de suppression de la remise gracieuse, le ministère des comptes publics est entré dans la négociation. On est revenu en partie sur la notion de juger les comptes et pas les comptables (ce qui a été démonté devant la CEDH). Si l’on admet que l’on juge le comptable, alors on arrive à la notion de préjudice. On identifie s’il y a eu ou non un manquement ; chaque manquement doit être évalué comme donnant lieu à un préjudice. S’il y a à la fois manquement et préjudice, il y a débet. En cas de manquement sans préjudice, la loi permet désormais une « somme non rémissible ». Pourquoi pas le terme d’amende, de sanction ? La prudence dans le vocabulaire vient des parlementaires en 2010 qui craignaient une augmentation du coût assurable. Il s’agissait de ne pas utiliser un vocabulaire de la sanction pour ne pas stigmatiser le comptable.

Dans ce nouveau régime il n’y a plus que deux cas permettant d’exciper la responsabilité : le décès et l’application d’un contrôle hiérarchisé de la dépense.

Bercy a renoncé à la remise gracieuse pour ces cas, à ce jour c’est en discussion à nouveau pour voir qui va tirer la prochaine réforme dans son sens.

Le régime de responsabilité des agent comptables présente des difficultés. Il faut pouvoir d’abord dire ce qu’est un préjudice financier, la jurisprudence a mis du temps à s’établir. Par exemple en matière de subventions à une association, 23 k€ est le seuil où l’on doit pouvoir produire une convention. Les détails (signature, acte…) ne sont pas tranchés entre les chambres régionales des comptes, il a fallu trancher en Conseil d’État.

Il a fallu se mettre d’accord sur la date d’existence du préjudice financier : au moment du manquement, ou au moment de l’intervention du juge ? Si un comptable oublie de déclarer la dette d’une entreprise en liquidation envers l’État, si de toutes manières il n’y avait pas de disponibilités à terme, aucune perception n’aurait été possible, il y a-t-il préjudice ? Après débats jurisprudentiels, finalement si l’action à terme de l’agent comptable n’aurait rien changé, il n’y aura pas préjudice.

Mme Damarey insiste sur le fait que la recherche d’un préjudice n’était pas la meilleure option pour déclencher la responsabilité du comptable, il y avait d’autres possibilités.

Autre question : si l’agent comptable est moins responsable, l’ordonnateur devrait le devenir plus. Dans le projet de Philippe Séguin en 2009, la CDBF devait être réveillée. Les élus locaux devaient être systématiquement responsables, et les ministres aussi : le texte n’avait aucune chance d’être adopté. Donc depuis 1948 et la création de la CDBF, rien n’a changé.

Or bon nombre d’affaires ressortent (privatisations contestées dans leur pertinence comme la concession des autoroutes, et ce qui est en débat concernant les aéroports), dans lesquelles l’on peut envisager de mobiliser le droit pénal, mais c’est difficile car les qualifications juridiques pénales sont exigeantes. Mme Damarey ne pense pas qu’il faille faire disparaître la responsabilité de l’agent comptable. Mais s’il agit sur ordre, l’agent comptable ne peut pas être considéré comme responsable. La Cour des comptes est un peu trop sévère dans l’appréciation de la force majeure : elle en profite en sachant qu’il y a la remise gracieuse derrière.

Question d’Etienne André : certains agents comptables n’ont plus de possibilité de recours et se font refuser la remise gracieuse par des établissements s’enrichissant sans cause, c’est déséquilibré et dangereux.

Mme Damarey : il y a d’autres incongruités, comme l’impossibilité de l’appel pour l’agent comptable qui relève directement de la Cour des comptes. Bercy profite de sa position pour conserver le pouvoir de remise gracieuse, et n’a pas intérêt à ce qu’on le révise. Le régime de responsabilité pécuniaire personnelle n’a été modifié que lorsqu’on n’avait pas le choix. Il n’y a jamais eu de volonté de faire bouger cela.

En cours de contentieux financier en master, à la fin des trente heures d’enseignement, Mme Damarey fait part de son désarroi à ses étudiants en disant que la CDBF ne fait rien.

Intervention de la DAF A3 sur la responsabilité personnelle pécuniaire du comptable

Jean-Amaury Luciani, accompagné de Virginie Chaunavel, représente la Direction des Affaires Financières. Il rappelle que le bureau a dans son périmètre la production des normes financières et budgétaires intégrées dans le code de l’éducation, et dans les circulaires dont l’instruction codificatrice M9-6. La DAF A3 assure l’instruction des demandes de remise gracieuse des comptables de notre ministère.

Fondements réglementaires de la RPP : selon l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963, la responsabilité personnelle pécuniaire s’applique au comptable pour ses propres actes, les agents sous son autorité, les régisseurs, et ses prédécesseurs.

Elle s’applique à une période déterminée, celle où il gère, et les actes précédents selon prescription de cinq ans. La RPP s’applique en cas de déficit, de recette pas recouvrée, dépense irrégulièrement payée, de besoin d’indemniser un tiers suite à une faute du comptable, de besoin de payer un intérimaire pour lui suppléer.

Diaporama DAF A3 sur la responsabilité personnelle du comptable

Mise en jeu de la RPP administrative : dans les cas de vol, détournement de fonds et gestion de fait. L’autorité est le ministre ou le recteur, les détournements de fonds restant la compétence ministérielle.

La procédure comprend une phase amiable puis contentieuse. Le recteur émet un ordre de versement, puis le comptable dispose de quinze jours pour demander un sursis ou une remise gracieuse. L’ordre n’est pas encore un titre exécutoire. La phase contentieuse commence après quinze jours en l’absence de réaction, et l’arrêté de débet peut être établi par le recteur.

Mise en jeu de la RPP après l’examen des comptes : le seuil de l’apurement administratif est fixé par l’article L211-2 du code des juridictions financières, il concerne les cas où les recettes de fonctionnement de l’EPLE sont inférieures à 3 M€. Examen par le PNAA. Le seuil est révisé tous les cinq ans, le compte 2017 servira à la révision de la carte.

Le SEPLE à Clermont-Ferrand aura vécu de 2013 au 31 août 2018. Le PNAA est à Rennes, avec une antenne à Toulouse ; c’est Rennes qui est en charge des EPLE. 20 % des comptes sont examinés chaque année (1 500 par an).

Les comptes Outre-mer ne sont plus apurés par les DRFiP locales, mais envoyés au PNAA aussi. Cf. la note de service du 12 septembre 2018 sur le transport et l’archivage des cofis.

Le PNAA produit des observations, transmises par courriel. Si l’agent comptable ne satisfait pas à des demandes majeures, le PNAA adresse une injonction. Si l’AC répond aux injonctions, le PNAA peut émettre un arrêté de décharge définitive. Si l’AC n’a pas été en capacité de répondre, alors le PNAA transmet à la chambre régionale ou territoriale de comptes un arrêté de charge provisoire, avec toutes ses observations susceptibles d’éclairer le juge.

La CRTC est l’autorité chargée du jugement des comptes ayant fait l’objet d’un arrêté de charge provisoire ; elle peut toujours émettre des amendes pour retard dans la production de comptes ; elle statue sur les recours en réformation des arrêtés de décharge définitive. Six mois après un tel arrêté, on est libéré de toute critique, mais pas en cas d’erreur, omission, faux.

La CRC dispose d’un droit d’évocation, qui lui permet d’obtenir la communication de tout compte qu’elle souhaite examiner par elle-même. Elle peut dessaisir le PNAA avant que la décision définitive sur les comptes soit notifiée, et dans les six mois suivant la notification.

Rennes s’adresse par courriel aux AC, par LRAR à l’ordonnateur et au DDFiP. Les comptes n’étant pas examinés sont archivés avec prescription de cinq ans, sauf usage du droit d’évocation de la CRC.

Le PNAA produit des restitutions annuelles pour l’amélioration de la qualité comptable, qui pourront servir de guide à l’évaluation des politiques de maîtrise des risques financiers et comptables.

Procédure juridictionnelle  : un compte peut être inscrit au programme d’examen, après notification au comptable en fonction ; l’examen est assuré par un magistrat instructeur. Si aucune charge n’est retenue, le président de chambre prononce une ordonnance de décharge ; l’ordonnateur ou le ministre des comptes publics peut s’y opposer (cette situation n’est pas courante).

Si des charges sont retenues cotre le compte, la formation de jugement est saisie, et un magistrat instructeur charge et décharge est nommé, comme prévu à l’article R242-2 du code des juridictions financières.

Les charges sont prononcées en audience publique. L’audience est notifiée au comptable sept jours au moins avant ; à l’audience toute partie peut formuler des observations. Après délibération, le jugement motivé fait l’objet d’une lecture publique, puis il est notifié.

En cas de charges retenues, le juge distingue désormais entre l’existence ou non d’un préjudice causé à l’organisme public :

  • sans préjudice, la responsabilité ne sera plus mise en jeu pour la totalité de la dépense irrégulièrement payée ou créance non recouvrée. Le juge tient compte des circonstances de l’espèce, et établit une somme entre 0.00 € et 0,15 % du cautionnement, dont il ne faut pas dire que c’est une amende.
  • En cas de préjudice, la RPP est mise en jeu pour la totalité des montants concernés. Le ministre peut accorder une remise gracieuse mais avec un minimum laissé à charge de 0,3 %, qui est assurable. L’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963 permet de mobiliser autant de fois ce plancher qu’il y a de manquements.

Tableau de l’activité juridictionnelle de la cdc et crtc

589 débets pour toutes les CRC, on ne sait pas combien contre les agents comptables d’EPLE, l’ensemble représente 17 M€

Voies de réformation des décisions : l’appel s’interjette devant la Cour des comptes ; il peut y avoir révision en cas d’éléments nouveaux, ou cassation.

Demande de remise gracieuse : elle se formule à l’attention du ministre des comptes publics, sous couvert du recteur et du ministre chargé de l’Éducation. Le recteur et le ministre de l’Éducation instruisent cette demande, c’est à ce stade qu’intervient la DAF A3.

Le ministre chargé du budget est compétent pour accorder la remise gracieuse ; il donne délégation aux DDFiP pour les comptables des EPLE pour les débets administratifs, sauf les cas de détournement de fonds et de paiement non libératoire

La demande de remise gracieuse n’est pas examinée de la même manière suivant la nature des faits (détournement ou simple manquement), les conditions d’exercice, les circonstances, la situation personnelle du comptable.

17 demandes de remise gracieuse sont actuellement en cours d’instruction à la DAF A3 :

  • 6 détournement de fonds,
  • 12 non recouvrement,
  • 1 paiement sans PJ,
  • 3 soldes non justifiés,
  • un inclassable.

Le dossier le plus ancien date de 2013. ; en 2018 on dénombre quatre cas de gestion de fait.

Remarque de Mme Damarey : pour relativiser la décision conservatoire du littoral (cf. p.29) avec une amende à chaque manquement commis : il y a une amende par catégorie de manquement. Le conseil constitutionnel a été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité sur l’office du procureur financier : la juridiction financière ne peut pas sortir des réquisitions du procureur, qui à ce jour a l’exclusivité des poursuites.

Question de Wilfried Vauvre : qu’en est-il de la responsabilité des régisseurs, comment est-elle activée ?

Jean-Amaury Luciani : il revient à l’ordonnateur d’émettre un ordre de versement. Il y a peu de dossiers. L’agent comptable n’est pas systématiquement mis en cause, il ne l’est que si son (in)action a eu des conséquences en lien avec les fautes du régisseur.

Stéphanie Damarey : le régisseur n’est pas responsable devant le juge des comptes. Il n’y a que devant le ministre qu’un régisseur peut être mis en cause.

Wilfried Vauvre fait alors valoir que les ordos se considéreront comme responsables de leur régisseur, et ne bougeront pas.

Stéphanie Damarey : c’est l’une des nombreuses incohérences dans le régime actuel de responsabilité.


A 12 h 15, les travaux sont suspendus pour le repas offert par l’association, assuré par la section hôtelière du lycée Auguste Escoffier d’Eragny.


A 14 h 00, les travaux reprennent par une présentation des élèves d’Escoffier par leur enseignant, qui sont applaudis.

Fabien Thorel annonce ensuite le résultat du challenge de l’académie la plus représentée à l’assemblée générale. C’est nouveau, l’académie de Paris, qui avait attendu de longues années avant d’être lancée par l’action de Sophie Viguier, partie depuis, est l’académie la plus présente.

Présentation de la table ronde présentée par Sébastien Wafflart : le devenir du régime de la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable public

Stéphane VIRY, député Les Républicains de la 1e circonscription des Vosges, avait accepté de participer, mais un imprévu l’a éloigné de notre assemblée.
Nous aurions souhaité avoir la participation de la DGFiP, qui travaille beaucoup sur cette thématique, mais c’est justement parce que la DGFiP travaille sur cette thématique qu’elle n’a pas souhaité être représentée.

Diaporama de la table ronde

Contexte du débat sur la responsabilité du comptable public

Sébastien Wafflart propose s’organiser la discussion autour de trois mots : SUPPRESSION - EXPERIMENTATION - EVOLUTION

Suppression

La proposition relative à la suppression de la séparation entre l’ordonnateur et le comptable dans les collectivités territoriales, déposée le 3 octobre 2018 par sept députés Les Républicains, a été renvoyée en commission des lois.
Pour certains commentateurs, cette proposition est un coup d’essai, un test, et a peu de chances d’aboutir. Reste que si bon nombre de propositions déposées par des parlementaires ne deviennent jamais des projets de loi, certaines sont transformées en amendements aux projets de loi.

Qu’en pensent nos invités ?

M Kruger pense que cette proposition fait l’amalgame entre deux choses :

  1. une évolution de la séparation ordonnateur-comptable est nécessaire. Mais lorsqu’une proposition de loi le propose, il y a quelque chose de juste mais aussi d’insuffisant car on peut pas considérer que supprimer cette séparation soit une solution, et remplacer le comptable par un commissaire aux comptes. On perçoit le sous-entendu que le modèle de l’entreprise est bon pour le secteur public, alors qu’au contraire les grandes entreprises introduisent des séparations entre les fonctions équivalentes au directeur financier / contrôleur financier / contrôleur des comptes.
    Il faut comprendre que cette proposition a un côté faussement moderne dans ce sens. L’idée de supprimer la séparation peut paraître fluidifier et simplifier, mais la réalité c’est que dans le privé on a introduit des modalités de vérification et de contrôle bien plus importantes.
  2. Il y a aussi une confusion sur la portée du travail du commissaire aux comptes. On connaît les limites des diligences du comptable public et de l’assurance qu’il peut apporter sur la fiabilité des comptes et le bon emploi des fonds publics. La relation contractuelle avec le commissaire aux comptes n’amène pas à une réelle indépendance.

Mais la séparation telle qu’on l’a connue avec un risque reposant essentiellement sur le comptable a vécu. Il faut prendre en considération les nouvelles attentes du public, l’évolution des systèmes d’information etc. Avec la dématérialisation, si l’on supprime la fonction comptable sans introduire un contrôle des risques avec une auditabilité de la chaine de confiance du système d’information, on court un risque bien plus important.

Expérimentation

Sébastien Wafflart s’adresse à Me Eric Landot : pouvez-vous nous expliquer les enjeux de l’expérimentation d’agences comptables dans le secteur public local, qui ne devrait concerner que les cinq cents plus grosses collectivités dans un premier temps ? Des collectivités sont-elles déjà candidates ?

Pour que tout le monde y voie clair, cette expérimentation est-elle différente de la mise en place de services facturiers, modèle d’organisation introduit par l’article 41 du décret GBCP de novembre 2012 ?

En d’autres termes, parmi les expérimentations en cours, il y en a-t-il qui tendent vers la suppression du comptable public, et d’autres au rapprochement en gestionnaires et comptables publics sans disparition du principe de séparation de l’ordonnateur et du comptable ?

Me Eric Landot : il a été sollicité une dizaine de fois sur le sujet, mais jamais dans un cadre formel. C’est déjà un premier indicateur. A sa connaissance, personne ne souhaite aller dans cette direction. Les plus sérieux n’étaient pas attirés par une plus grande souplesse ou l’amélioration du délai global de paiement, c’étaient plutôt ceux qui émettent beaucoup d’actes en recouvrement du fait de la lourdeur du système.

Ils y ont vu un surcoût non compensé. Quel serait le gain en terme de recouvrement, de souplesse ? Et la technicité des comptables n’était pas niée non plus. Donc ils y ont vu surtout un surcoût. Par contre le sentiment est très général d’un système à bout de souffle, dans la responsabilité du comptable et dans la séparation ordonnateur-comptable.

Le sentiment général lui semble être qu’il faille s’engager en ce sens, mais avec un risque de coûts nouveaux, et pas assez d’information sur le partage des responsabilités.

Sébastien Wafflart : il y a déjà le système des services facturiers. Mais en plus, l’association des maires de France s’inquiète justement que ce projet de loi puisse aller vers la disparition de la séparation.

M. François Kruger : et les exécutifs élus s’inquiètent du risque de responsabilité. Ils peuvent craindre d’être rattrapés par la procédure de gestion de faits et de se retrouver devant le juge des comptes. Or ils ne sont pas habitués à rendre des comptes au juge financier.

Me Eric Landot : d’accord sur l’enchaînement des actes juridiques. Il ajoute que l’association des maires de France est dans un contexte de discussion tendue actuellement, et surtout énormément d’élus locaux ne voient ces réflexions sur les questions de responsabilité autrement que comme une montée en puissance de la mise en cause de leur responsabilité (beaucoup plus que devant la CDBF).

L’un des problèmes est aussi qu’il faudrait probablement des sanctions, mais sans pour autant aller au pénal. Il y a une vrai place pour une sanction de l’ordonnateur, mais beaucoup de travail pour pouvoir l’envisager.

M. Fabrice Nicol : il s’exprime là en temps que responsable syndical. Le SJF a pris position dans son Livre beige et a formulé des propositions. Il souhaite souligner l’enjeu de la responsabilité de l’ordonnateur. Il faut clairement aller dans ce sens. Ils ont fait des propositions qui n’ont pas encore abouti. Il faut poser une exigence de cohérence, nécessaire pour les ordonnateurs et les comptables, mais aussi les magistrats. Il faut reconstituer un cadre qui prenne en compte l’évolution des pratiques et des métiers de comptable et d’ordonnateur.

Il faut que la responsabilité financière de l’ordonnateur soit mieux reconnue ; on ne sait pas combien de temps cela prendra mais il faut aller dans ce sens.

Question de la salle : les agences de notation qui notent les collectivités territoriales se sont elles intéressées au sujet ?

M. François Kruger : à ma connaissance non, mais ça peut changer car les risques décrits n’étaient pas perçus. Personne aujourd’hui n’est redevable de la fiabilité des services d’information. Aujourd’hui il est assez facile de détourner de l’argent public via les SI. Pour l’instant les agences de notation attendent les incidents. Et ce point ne sera probablement exigé qu’après.

Mais avant les agences, il y a les citoyens : il est de plus en plus difficile d’expliquer l’absence de sanction pour l’argent mal employé. La Cour a développé l’idée d’une sanction du gâchis de l’argent public évitable. L’idée est de sanctionner quand on n’a pas cartographié les risques, quand on a pas tenu compte des signaux d’alerte, des bonnes pratiques connues etc. Mais celui qui par incompétence a planté un système d’information ayant coûté un milliard, il n’a pas gagné quoi que ce soit, il n’en avait pas l’intention : il n’y a pas lieu d’une sanction pénale de l’ordre de la réparation financière.

A ce jour le risque d’être sanctionné au pénal sans intention ni enrichissement est faible, mais il existe et ce n’est pas normal. Le juge du compte peut rentrer dans cette organisation, trouver son rôle, annoncer qu’il ne sanctionnera qu’après sommation. On peut rassurer les fonctionnaires, les prendre au sérieux : ne seront plus sanctionnées que les situations où la négligence est caractérisée.

Évolution

Sébastien Wafflart s’adresse à Fabrice Nicol : dans l’exposé des modifications législatives de votre proposition pour une évolution de la responsabilité personnelle et pécuniaire, vous indiquez que le principe de séparation a évolué, et que la frontière séparant les champs d’investigation de l’ordonnateur et du comptable public est devenue mouvante : en cause les centres de traitement et de paiement unique des factures (les services facturiers), les mesures permettant au comptable de remonter la chaîne de l’ordonnancement, et l’expérimentation de la certification des comptes. Que proposez-vous pour clarifier la RPP ?

M. Fabrice Nicol : le livre beige sera appelé à évoluer bien sûr. En l’état actuel des choses la RPP pose la question de la reconnaissance des circonstances effectives de gestion : notamment on manque de moyens pour s’opposer à des dérives. Il souhaite que le cadre évolue pour mieux reconnaître la difficulté de certaines situations. L’idée est de supprimer le débet, et de faire de la somme non rémissible le droit commun.

Mais il faudrait aussi en revoir les bornes, car les sommes sont très faibles. Il y a aussi pour l’instant encore beaucoup de différences dans les jurisprudences qui doivent être consolidées.

Sébastien Wafflart : ce matin la professeure Damarey évoquait l’idée de parler réellement d’amende et d’étendre l’étude des cas aux circonstances.

M. Fabrice Nicol : on a gardé l’idée de somme non rémissible, et pas d’amende pour éviter les confusions. Mais cela peut évoluer.

M. François Kruger : le jugement des comptes était objectif (les comptes, pas la personne). Mais en réalité, compte tenu de la remise gracieuse, il n’y a pas de réelle réparation. L’autre logique c’est l’amende. Donc un logique de sanction de la personne, mais dans ce cas il faut effectivement prendre en compte des circonstances. Il faut donc envisager de quitter l’idée de jugement objectif, et aller vers un jugement de la personne selon les circonstances. Mais le juge des comptes qui le ferait perdrait son office.

Actuellement il un jugement est en cours devant la CDBF : M. Kruger a plaidé pour mettre en rapport la perte, qui est de l’ordre du million, avec la sanction.

Deux mots (que tout oppose ?) : DEBET vs QUALITE

Sébastien Wafflart demande à Jean-Luc Nodenot ce qui advient de l’assurabilité du risque. Qu’est-ce que la réforme de décembre 2011, qui permet de distinguer le niveau de responsabilité du comptable selon qu’il y a eu, ou non, préjudice financier, a changé pour l’assureur du risque comptable que vous êtes ?

M. Jean-Luc Nodenot : l’AMF est bien une mutuelle, elle ne recherche pas de profit mais juste la défense des comptables publics. Elle n’a pas d’avis à donner sur des analyses ou propositions : si demain une assurance n’est plus nécessaire, la mutuelle en prendra acte et mettra fin à ses opérations. Par contre il faut doit rappeler qu’on ne peut pas dissocier les mécanismes mis en œuvre du risque supporté par les comptables. Aujourd’hui on est dans un système qui ne permet plus d’assurer à un certain nombre de comptables publics que leur poste n’atteindra pas leur patrimoine.

Donc Jean-Luc Nodenot n’est pas d’accord avec l’idée de justice retenue. C’est plutôt un mécanisme de régulation d’un risque qui n’est aujourd’hui plus assurable qui lui semble nécessaire.

On a des comptables publics actuellement, notamment en EPSCP, qui pourraient avoir des débets énormes, et les conseils d’administration concernés ne semblent pas disposer à voter une remise gracieuse.

Sur l’expérimentation des agences comptables : avec l’idée d’une agence embarquée, l’AMF y a vu un risque et a précisé qu’ils n’assurerait pas ce risque.

M. François Kruger : si on est dans un régime d’amende, il n’y a pas d’assurabilité. Si on est dans un régime de débet, effectivement la remise du ministre permet d’en limiter les effets. Ce qu’ils proposent est de passer dans un régime de responsabilité de l’ensemble des acteurs, mais sans assureur.

Actuellement on est dans un entre-deux, avec des cas d’enrichissement sans cause. La réforme de 2011 n’a pas tenu ses promesses. Actuellement, soit il y a manquement et c’est avec préjudice, soit il n’y a pas de manquement. Le préjudice, qui devait être exceptionnellement constaté, s’est généralisé. Et ce problème d’assurabilité est un symptôme que le système a vécu.

L’idée aujourd’hui est de prendre en compte le contexte et donc cela rend la proposition de contrôle des ordonnateurs beaucoup plus équilibrée. Mais on pourrait aussi envisager un système ou les ministres ne seraient pas ordonnateurs, cela faciliterait à coup sûr son adoption.

Sébastien Wafflart revient sur la notion de qualité. Avec les réformes actuelles, y a-t-il une évolution de la fiabilité des comptes ?

M. Fabrice Nicol : les comptes sont très largement dépendants de la comptabilité administrative tenue par les services des ordonnateurs. Et c’est souvent là qu’est l’origine des défauts. Donc non, il n’y a pas d’amélioration particulière au niveau global. La fiabilité des comptes est très variable. Les progrès sont plutôt le fait de la fiabilisation des systèmes d’information, de l’arrivée de fonctionnaires mieux formés notamment sur les règles de la commande publique. Par contre, on observe dans certains endroits une dégradation liées aux fusions, diminutions d’effectifs et autres économies sur les fonctions support, qui font que les chefs de poste comptables n’ont plus le temps de faire face à toute leurs obligations.

Me Eric Landot : on voit une meilleure structuration des collectivités territoriales, mais aussi un changement de culture qui va vers plus d’échange avec l’ordonnateur et ses services, qui est appréciable. Autre point intéressant, une évolution qualitative dans le monde des établissements de santé avec le compte financier unique.

Mme Martine Saguet : pour l’enseignement secondaire, la Cour des comptes critiquait dans le rapport de 2008 la position du comptable et le cumul de fonctions de gestionnaire, adjoint de l’ordonnateur. En 2011 toutefois, un satisfecit a été donné au ministère sur le resserrement de la carte comptable, mais toujours un regret en l’absence de séparation.

Quelques années après, l’étude de l’inspection générale a mis en évidence un lien fort entre le resserrement du réseau, la professionnalisation et l’amélioration de la qualité.
On voit avec les grandes agences des agents comptables plus sereins, mieux entourés, et on arrive à une évolution du positionnement avec un AC capable d’assurer un conseil pour l’ordonnateur, et garant de la fiabilité de la gestion.

Un autre modèle se développe avec les universités : 67 EPSCP ont choisi d’avoir une agence comptable internalisée. Une enquête est actuellement en cours qui a reçu à ce jour 55 réponses : cinq universités ou l’AC est aussi chef des services financiers. Il semble que les évolutions actuelles et notamment la GBCP ont amené le comptable à un changement de position. On va vers un « directeur comptable » qui couvre l’ensemble des comptabilités, et un DAF qui assurerait la stratégie et le pilotage.
Les universités ont considérablement progressé depuis le passage à l’autonomie. Élément accélérateur : la présentation des comptes à un commissaire aux comptes.

Question de la salle : L’éventuelle disparition du comptable ne va-t-elle pas entraîner un objectif commercial pour des officines privées ?

Mme Martine Saguet : les rôles du commissaire aux comptes et de l’agent comptable sont distincts. La question porte plus sur le repositionnement de l’AC et son rôle auprès de l’ordonnateur. Le panel est de plus très large, le terrain d’observation à l’EN est très intéressant, du petit collège à la grosse université.

De la fiabilité des comptes...

Sébastien Wafflart revient sur la proposition de loi du 3 octobre 2018, laquelle argumente "(...) cette réforme est nécessaire et les arguments ne manquent pas : excès de formalisme, lourdeur des procédures, redondance des tâches et des contrôles, consommation inutile de personnel, inadaptation des solutions informatiques, etc."

Or les dispositifs réglementaires, les outils et la culture des comptables publics ont évolué ces deux dernières décennies. Les rapports de la Cour des comptes ou, au sein de notre ministère, de l’inspection générale, tendent vers le constat d’une évolution positive de la fiabilité des comptes. M. Kruger, Mme Saguet, confirmez-vous cette lecture ?

MM. Nicol, Landot et Kruger, il y a-t-il des nuances à apporter en ce qui concerne les collectivités territoriales ?

... à la question des moyens

Un courrier comme celui-ci laisse penser que l’État cherche simplement à faire des économies. Et si on se posait la question des moyens ?

En effet, si les CRTC et la Cour des comptes analysent l’efficacité de la gestion des deniers publics, c’est-à-dire le rapport entre les moyens mis en œuvre par les gestionnaires publics et les résultats obtenus, cette question des moyens n’est jamais abordée lorsque l’on juge les comptables publics.

Or cette question des moyens mérite d’être posée : combien faudrait-il de comptables publics pour réaliser une certification de qualité de tous les comptes publics ?

M. François Kruger : au contraire l’AC est de plus en plus cher, car on a des moyens limités et il faut recentrer son action car on lui confie trop de missions. Il faut donc prioriser là où il y a un gain possible (donc la perception de la TVA plutôt que poursuivre des entreprises qui sont de toute façon insolvables).

Autre observation sur la taille critique : il est important qu’il y ai une masse d’expertise critique. Il faut des fonctions de contrôle, et cela nécessite de regrouper les forces. Un exemple peut être facilement pris dans les systèmes informatiques. Mais à l’heure de l’intelligence artificielle, un comptable qui s’éloigne des gens dont il a la charge perd en qualité, car il porte seul l’intelligence sociale, une fonction qui ne sera pas automatisable et qui contribue de manière certaine à la pertinence du contrôle.

Les moyens sont des humains qui interagissent

Sébastien Wafflart : un autre argument de la proposition de loi : "l’élément, aujourd’hui, le plus pénalisant dans la séparation des fonctions réside certainement dans le fait qu’il conduit les ordonnateurs et leurs services à se désintéresser de la comptabilité (...)"
Que l’on soit élu ou nommé, ne pensez-vous pas que l’intérêt des ordonnateurs pour la comptabilité, et par extension pour le pilotage économique et financier, est avant tout une question de culture, de formation et de tempérament ?

Focus sur le "cas particulier" de l’Éducation nationale

Un dernier argument de la proposition de loi : "(...) l’étanchéité qui a prévalu jusqu’à présent entre ces deux acteurs (l’ordonnateur et le comptable public) doit céder la place à la complémentarité, car il leur faut désormais maîtriser des processus et non plus s’échanger des bordereaux de titres ou de mandats"

Un modèle souvent décrié, celui de l’Éducation nationale, dans lequel les comptables publics sont également adjoints de l’ordonnateur en poste dans leur résidence administrative, a aujourd’hui le vent en poupe.

Notons quelques atouts :

  • la proximité (qui renvoie au modèle d’agence comptable intégrée)
  • le rôle de conseil,
  • la possibilité de remonter dans la chaîne de l’ordonnancement pour réduire le risque d’erreur,
  • la production d’un compte financier unique et surtout d’un rapport conjoint (qui s’oppose à la séparation entre compte administratif et compte de gestion dans les collectivités).

Faut-il généraliser ce modèle ou s’en inspirer pour garantir le principe de séparation en l’adaptant à l’exigence d’efficacité ?

Mme Martine Saguet : les acquis de ces dernières années et notamment sur les plus grosses structures sont encourageants. Donc il faut en faire la promotion. La moyenne de six EPLE a été atteinte l’année dernière (il a donc fallu dix ans pour l’atteindre). Mais sur ce niveau de 6, il y a des difficultés justement du fait de la double casquette. Avec des structures plus importantes, on trouve un confort, avec des équipes dédiées, mieux identifiées, et cette expertise acquise profite aux ordonnateurs dans le cadre de l’animation du réseau.

La double casquette permet de maintenir la sensibilité de l’agent comptable sur les problématiques EPLE.

Question de la salle sur le suivi des régisseurs et leur assurabilité

M. Jean-Luc Nodenot : une des caractéristiques des EPLE c’est effectivement le nombre de régisseurs. Il faut les inciter à s’assurer, et les conseiller.

M. François Krueger : attention a ne pas penser que ce qui marche en EPLE peut marcher ailleurs. Par exemple si l’ordonnateur est un professionnel nommé ou un élu, c’est pas comparable.

Sur la question des personnes appelées à rendre des comptes, il y a pas mal d’affaires récentes. On a des situations complexes ou le juge des comptes va rechercher la responsabilité de personnes qui n’étaient pas directement en charge des opérations. Avec l’informatique, on va vers une recherche de qui a réellement fait quoi, il faut trouver une responsabilité individuelle dans un environnement intégré et collectif.
Mais il faudrait que la loi soit plus sécurisante.

Le défi est de garder une responsabilité individuelle. La facilité serait d’aller vers une responsabilité « collective » qui diluerait la responsabilité. On peut aussi envisager la mise en jeu de la personnalité de la personne morale. On pourrait par exemple permettre de sanctionner un conseil municipal qui prendrait la décision d’une prime illégale.

Question de la salle : en fin de compte, le problème n’est il pas celui de la fréquence des sanctions ? Celle-ci est elle adaptée au nombre d’actes contrôlés ? Et si l’on sanctionne trop les erreurs, ne risque-t-on pas d’avoir une perte importante de candidats aux fonctions d’ordonnateur et comptable ?

M. François Kruger : attention à ce pays qui aime bien le contrôle. On est le seul pays qui envisage un juge des comptes locaux + certificateur + contrôles. Faute d’autres moyens, le pénal s’invite sur le terrain de la comptabilité. Si le délit de favoritisme est consommé en l’absence d’intention, cela ne peut pas marcher. Et la CDBF ses six arrêts par an à 1 000 € de sanction chacun, ce n’est pas raisonnable.

On note d’intéressantes évolutions, exemple avec l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Réparation (ACPR). Il y a possibilité d’émettre des avertissements, des sommations, avant la sanction juridictionnelle. Une organisation mieux fondée en prévention et correction permettrait d’exercer de sévères sanctions, justes et là où c’est nécessaire.

Dans le secteur public, on est énormément dans le contrôle. Mais du côté du gestionnaire c’est trop, et ce est pas forcement celui qu’il faudrait. A l’opposé on peut aller jusqu’à l’intervention du droit pénal, qui n’est pas forcement justifiée (exemple avec le délit de favoritisme reconnu sans intentionnalité). On peut tirer un grand bénéficie des régulateurs qui sont récemment montés en puissance. On peut aller vers un système qui recherchera plus la recherche des responsabilités qui ont un enjeu.

L’idée est de n’envoyer au pénal que ce qui est vraiment frauduleux, et de sanctionner autrement ce qui relève de la mauvaise gestion, de l’incompétence. Si on rentre dans un système où l’on contrôle aussi l’analyse des risques qui est menée, et que l’on fait des sommations avant sanction du juge. On sort du flou, et c’est plus rassurant aussi pour l’ordonnateur. Donc ça devrait marcher.

M. Jean-Luc Nodenot : le risque reste celui de l’assurabilité. Il faut lever ce qui peut être vécu comme anxiogène dans la notion de débet.

Sébastien Wafflart : si l’on sanctionne de manière non assurable, ne va-t-on pas assécher le recrutement de ces responsables ?

M. François Kruger : il faut éventuellement des amendes aggravées, mais pas forcement en lien avec le préjudice, car cela n’aurait pas de sens de chercher une réparation à hauteur de la perte par exemple dans le cadre d’une fraude aux faux virements. Observez les réquisitions du ministère public sur une célèbre affaire où est soupçonnée l’escroquerie en bande organisée entre avocats, cabinet du ministre, et les bénéficiaires supposés : les réquisitions sont des peines de prison, des amendes très élevées (jusqu’à plusieurs dizaines de millions d’euros) : on est vraiment dans le cas d’une fraude, ce n’est pas assurable. Mais le risque pénal devrait être limité à de telles fraudes.

Mais celui qui par incompétence a planté un système d’information ayant coûté un milliard, il n’a pas gagné quoi que ce soit, il n’en avait pas l’intention : il n’y a pas lieu d’une sanction pénale de l’ordre de la réparation financière. A ce jour le risque d’être sanctionné au pénal sans intention ni enrichissement est faible, mais il existe et ce n’est pas normal. Le juge du compte peut rentrer dans cette organisation, trouver son rôle, annoncer qu’il ne sanctionnera qu’après sommation. On peut rassurer les fonctionnaires, les prendre au sérieux : ne seront plus sanctionnées que les situations où la négligence est caractérisée.

M. Jean-Luc Nodenot : cela ne le convainc pas. Si l’on prend l’exemple de l’attaque par des escrocs comme une fraude aux faux virements, quelle sera le régime de responsabilité ? Il est important de lever les questions anxiogènes.

M. François Kruger : il faut clarifier les notions de préjudice, de débet. On ne peut pas garantir la réparation à hauteur du préjudice, sinon ce n’est pas assurable. Et si l’on est dans un régime d’assurabilité, il ne faut pas qu’un seul acteur soit assuré, sinon tout retombera toujours sur celui-là. En tout cas il faut sortir de l’ambiguïté sur ce qui déclenche la responsabilité.

Question de la salle : il n’y a toujours pas d’obligation de mobilité pour les comptables d’EPLE et on se rend compte lors des passations de service que ce n’est pas forcement une bonne chose. Ne faudrait il pas envisager une obligation de mobilité ?

Mme Martine Saguet : c’est quelque chose qui a été évoqué dans les derniers rapports. D’un côté aucune obligation ,’est imposée aux comptables y compris pour les attachés accédant au principalat, et de l’autre des AENESR avec une obligation de mobilité, mais sans accompagnement et sans avantage à l’issue des huit années sur poste fonctionnel. Pour l’instant, rien n’est prévu. Mais il y a pas mal de sujets en cours (notamment les fondés de pouvoir, l’indemnitaire etc) et cela fera peut être l’objet d’une approche globale.

Question de la salle sur l’évolution du régime de responsabilité dans le contexte de l’apparition d’Op@le et MF².

Mme Martine Saguet : il y a des opportunités à saisir. Il faut se rapprocher des universités pour voir ce qui s’y est fait. Il faut s’emparer des services que peuvent rendre ces systèmes d’information.

Il faudra aussi se saisir du changement de position entre ordonnateur et comptable, avec un comptable qui ira plus haut dans la chaîne et pourra donc anticiper mieux compte tenu de l’intégration qu’offre le SI.

Dans ce type de système la qualité de la première saisie est essentielle, il nous faudra donc s’assurer de cette qualité. De grands espoirs reposent sur le projet, d’amener les comptables d’EPLE aux mêmes standards de qualité que les autres comptables publics. Les services facturiers sont intéressants, il faudrait que les agents comptables d’EPLE aillent voir dans les universités les progrès que cela représente.

A l’approche de 17 heures, Sébastien Wafflart remercie les intervenants.

Comptabilité et convivialité